Edition du épidémiologique rapport mensuel d’octobre de l’ARSIA.

Bien plus qu’un simple inconfort passager, les fortes températures pénalisent à long terme la reproduction et fragilisent la santé des bovins.
En effet, quand leur température corporelle augmente, les vaches subissent des modifications hormonales lesquelles perturbent le bon développement des ovules et l’expression des chaleurs. Il en va de même pour les taureaux dont la spermatogénèse est altérée par le stress thermique. Par ailleurs, en début de gestation voire jusqu’en milieu s’il se prolonge, un épisode de canicule augmente les risques d’avortement. Il apparaît que si la température corporelle dépasse les 39°C lors des 50 premiers jours après l’insémination artificielle, la survie de l’embryon est incertaine. Des contrôles de gestation après un épisode de fortes chaleurs sont recommandés, ainsi qu’attendre une période plus fraîche pour programmer des transferts d’embryons. Enfin, pour favoriser l’évacuation de la chaleur par la peau, la vascularisation des tissus est modifiée. Mamelle et utérus sont moins irrigués, d’où la baisse de production laitière et la croissance perturbée du fœtus.
Sécheresse et carences alimentaires
OPTIVAL, une coopérative au service des agriculteurs dans le Grand Est en France a évalué l’impact de trois années successives de sécheresse, de 2017 à 2019, sur les performances des élevages allaitants en Meurthe-et-Moselle, Vosges et Meuse à partir des données de reproduction et de pesée des veaux du contrôle de performances. Selon l’étude, l’effectif de vaches a augmenté de 15 à 20% mais le nombre de veaux est resté le même. Les intervalles vêlage-vêlage se sont allongés de 25 jours en moyenne pour les multipares et la croissance des veaux a baissé de 5 kilos. Ce qui se cumule aux surcoûts alimentaires et à la dégradation des prairies naturelles. Le taux important de vaches vides était souvent lié aux causes évoquées plus haut, mais était aussi certainement en lien avec des carences en oligo-éléments et minéraux durant la période estivale et/ou la période hivernale. L’impact économique sur un troupeau moyen de 60 vaches allaitantes s’élève à 20% des vaches vides, soit 12 vaches improductives à nourrir l’hiver, à raison de 500 € par vaches = 6 000 €.
Quelques solutions
Faire un diagnostic de gestation des vaches rentrées, ne pas sous-doser – en période hivernale comme en période estivale l’apport de minéraux et d’oligo-éléments, augmenter les apports énergétiques de la ration 3 semaines avant la mise à la reproduction et jusqu’à 3 semaines après les dernières inséminations.
Nos observations
A cause de la diminution générale du cheptel et du nombre de troupeaux, et dans le contexte économique du marché et de la consommation de la viande, on constate une diminution du nombre de naissances déclarées en 2019 de près de 13 000 veaux, mais avec un taux par rapport à l’effectif bovin total pratiquement identique à 2018, soit près de 39%. Nous ne pouvons donc a priori évoquer un impact de la sécheresse de 2018 sur la natalité en 2019. Par ailleurs, il n’y a pas de correspondance visible entre les jours de canicule et des augmentations ponctuelles d’avortements, même quelques jours plus tard. A ce stade, nous en concluons qu’il y a sûrement un effet mais probablement pas «extra » ordinaire, avec des avortements en série… Enfin, une diminution du nombre de naissances liée à une augmentation des avortements reste toujours imputable à un grand nombre de facteurs:
- Infectieux
- Non infectieux
– Alimentaire (quantité et qualité de la ration, plantes toxiques, moisissures, …)
– Environnementaux (sécheresse, canicule, chocs, …)
– Management (suivi de gestation, …)
L’impact réel de la sècheresse et/ou d’une canicule en Wallonie nous demande une analyse approfondie de nombreux
paramètres. Si on conçoit bien qu’il affecte nos animaux et leurs productions, sa quantification reste plus complexe eu égard aux nombreux paramètres existants. La répétition des épisodes de chaleur et de sécheresse nous amènera toutefois à évaluer l’année 2020, sur base des informations dont nous disposerons à terme. Ceci afin d’au besoin proposer aux éleveurs des solutions ou pour le moins des adaptations dans leur management, et ainsi anticiper des situations problématiques.
Sécheresse, intoxications alimentaires et malformations congénitales
Un autre problème lié à la sécheresse est la consommation possible par les ruminants de plantes inhabituelles, avec plus de 240 plantes impliquées dans les intoxications, dont la plus fréquente est due aux glands. En février dernier (Arsia Infos nr 183 ), nous évoquions déjà le rôle des plantes toxiques dans les malformations congénitales, essentiellement la raideur des articulations et les déformations osseuses: grande ciguë, vératre, astragale, oxytropis champêtre, lupin, sorgho, tabac, et probablement aussi séneçon, coquelicot, colchique, pervenche, …
La mise à disposition en suffisance de fourrages limite le risque, bien que certains bovins puissent devenir « accros», notamment de glands de chêne. Il est important d’observer quotidiennement ses animaux au pâturage et notamment leur comportement alimentaire.
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